Nach Volins Synthese gestern, begehe ich heute den Geburtstag von Bernard Voyenne, dem Historiker des Föderalismus, Proudhonianer und Weggefährten Camus', der heute 90 geworden wäre (Voyenne ist am 22.12.2003 verstorben), folgerichtig mit Voyennes Kritik an der Synthese (nicht nur der anarchistischen):
"Il convient ici de se souvenir de la si juste notation de Sainte-Beuve, selon laquelle Proudhon - plutôt que de s'épuiser à percer les arcanes de la dialectique hégélienne - aurait dû se tourner d'emblée vers Pascal, dont il était plus proche encore qu'il ne le croyait. Conseil qui avait été suivi (sans que l'étude inachevée du subtil critique en fasse état) dès la deuxième édition de la Justice (1860), où il dit très précisément:
'A l'exemple [de Hegel], j'avais adopté l'idée que l'antinomie devait se résoudre en un terme supérieur, la synthèse, distinct des deux premiers, la thèse et l'antithèse: erreur de logique autant que d'expérience, dont je suis aujourd'hui revenu. L'ANTINOMIE NE SE RESOUT PAS: là est le vice fondamental de toute la philosophie hégélienne. Les deux termes dont elle se composent SE BALANCENT, soit entre eux, soit avec d'autres termes antinomiques...'
Et, dans une note finale, il recourt à une comparaison très éclairante pour notre propos: 'Les termes antinomiques ne se résolvent pas plus que les pôles opposés d'une pile électrique ne se détruisent (...); ils ne sont pas seulement indestructibles, ils sont la cause génératrice du mouvement, de la vie, du progrès; le problème consiste à trouver, non leur fusion, qui serait la mort, mais leur équilibre, sans cesse instable, variable selon les développements mêmes des sociétés.' Dès lors sa pensée ne changera plus.
Comme Miguel de Unamuno (1) l'a remarqué avec profondeur, la logique de Pascal 'n'était pas une dialectique mais une polémique; il ne cherchait pas une synthèse entre la thèse et l'antithèse: il restait comme Proudhon, un autre pascalien à sa manière, dans la contradiction.' Inspiré par la vision augustinienne du pôle positif des hérésies, ce contrepoison au fanatisme religieux est transposable à tous les domaines. La vérité, telle que les hommes peuvent espérer la rejoindre, est comparable à une empreinte qui doit se passer du relief au creux, et inversement, pour être fidèle à l'original. Ou encore ces Janus à double visage, que l'art moderne a créés pour représenter la totalité du réel. Ces métaphores statiques sont néanmoins insuffisantes pour rendre compte du mouvement qui, allant de la question à la réponse et de l'affirmation à la contre-affirmation, gravit une spirale ascendante jamais arrêtée, ni jamais recommencée.
Si authentique que soit dans le désir d'objectivité (et ce n'est déjà pas fréquent) chacun de nous - engoncé dans ses préjugés, ses intérêts et ses passions grandes ou minuscules - n'a jamais que des points de vue. Isolés, ceux-ci sont hors d'état d'être efficacement communiqués et, dans le meilleur des cas, ne font qu'approcher ce que nous voulons dire. Seule la confrontation à d'autres façons de penser permet une mise en perspective, et par là un relief, capables d'approcher la complexité du réel. Comprendre, c'est englober.
Toute affirmation partielle (il ne saurait évidemment y en avoir d'autres) est par définition une erreur et aucune proposition, si juste soit-elle en apparence, ne peut être retenue même à titre provisoire si elle n'a pas été soumise à l'objection. Sed contra est, devaient impérativement ajouter les scolastiques à chaque étape de leur raisonnement, introduisant par là un interlocuteur imaginaire auquel ils devaient répondre avant d'aller plus en avant. La démarche scientifique ne procède pas autrement.
Qui se borne à monologuer 'suit son idée' et ne suit qu'elle. C'est le vertige absolutiste dont étaient atteints - pour leur malheur et surtout celui de leurs contemporains - un Néron, un Robespierre, un Staline ou un Hitler. Les formes extérieures peuvent changer, mais la prétention d'avoir raison à soi seul est identique chez tous. Ces tyrans sont devenus sourds pour n'avoir entendu que leur propre voix, paranoïaques à force de s'adorer eux-mêmes. Ivres du pouvoir qu'ils se sont attribué, domineraient-ils la terre entière ils ne seront toujours que leur clone, l'ombre hypertrophiée de leur personnage. C'est pourquoi leur appétit de puissance finit par se dégrader en incapacité d'agir.
Sans aller jusqu'à ces mannequins du néant, le bateleur politique, l'avocat s'identifiant par principe à la cause de son client, sont dangereusement exposés au vertige simplificateur qui les pousse à la suppression de l'adversaire. Y a-t-il en effet façon plus expéditive de triompher que de nier ce qui fait problème? On n'a alors fait disparaître qu'une ombre, sans se rendre compte que tout est mensonge dans ce jeu de miroirs et de dupes. Qui refuse de se battre a perdu d'avance; mais qui prétend vaincre sans avoir mené un vrai combat se dupe lui-même et n'a jamais quitté ses fantasmes."
(1) L'agonie du christianisme, trad. fr., Paris, Rieder, 1925, p.117.
Auszug aus "Pascal - Proudhon - Péguy", in Bernard Voyenne, Proudhon et Dieu. Le combat d'un anarchiste, Paris, 2004, S. 154-156.
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